Franchiseur et obligation pré-contractuelle d’information

février 21, 2020

Arrêt : cour d’appel de Versailles, 24 Octobre 2019, n° 18/02778

Apport principal de l’arrêt : Arrêt d’espèce fournissant un exemple d’absence de manquement du franchiseur à son obligation d’information pré-contractuelle due au franchisé, telle que définie par l’article L. 330-3 du Code de commerce, malgré la fourniture de comptes prévisionnels qualifiés de « fantaisistes » par ledit franchisé.

En l’espèce, un franchiseur exploitant un réseau de restaurants a remis un document d’information pré-contractuel et des comptes prévisionnels à un franchisé potentiel. La société du franchisé est placée sous redressement puis liquidation judiciaire seulement sept mois après l’ouverture de l’établissement. Le franchisé assigne alors le franchiseur en nullité du contrat de franchise, au motif qu’il aurait remis un document d’information pré-contractuel erroné et incomplet ainsi des comptes prévisionnels trompeurs.

Concernant le document d’information pré-contractuel, la cour d’appel de Versailles rappelle que l’état local du marché présenté par le franchiseur ne correspond pas à une analyse du marché, cette analyse incombant au seul franchisé. L’information sur l’état local du marché présentée par le franchiseur est une simple présentation générale de la situation locale, et l’assistance prévue du franchiseur pour l’étude de marché qui pourrait en découler ne signifie pas que le franchiseur doit la réaliser lui-même.

Concernant le compte prévisionnel, la cour d’appel de Versailles rappelle que le franchiseur n’est pas tenu d’en remettre au franchisé potentiel et que s’il décide de le faire, celui-ci doit contenir une information sincère et loyale : il engage sa responsabilité si tel n’est pas le cas. La cour d’appel adopte dans sa décision une position clairement en faveur du franchiseur : elle retient qu’un franchiseur peut éviter la mise en cause de sa responsabilité dès lors qu’il fait preuve d’assez de réserves dans les documents pré-contractuels qu’il transmet à son futur franchisé, et ce quand bien même il transmettrait un chiffre d’affaires prévisionnel (par exemple, en apposant les mentions « avant-projet » et « non contractuelle » sur les documents transmis au franchisé, ou encore en précisant que les hypothèses doivent être confirmées par une étude de marché).

Cette décision qui exclut toute responsabilité du franchiseur doit être lue avec précaution, et il convient de demeurer prudent notamment sur la communication de comptes prévisionnels. La communication de données historiques objectives par le franchiseur au franchisé afin qu’il établisse des prévisions, tel que c’était fait en l’espèce, ne constituent pas des projections complètement incertaines construites par le franchiseur. Il est ainsi opportun, comme en l’espèce, d’inciter le franchisé à faire évaluer de telles hypothèses par une étude de marché ou les remettre pour une analyse complète à un professionnel de la comptabilité, afin d’éviter tout engagement de la responsabilité du franchiseur.

https://www.doctrine.fr/d/CA/Versailles/2019/C83A42BFDDE8F98DDF658